D’origine autrichienne, Forstner fait souvent référence aux pratiques picturales expressionnistes (Otto Dix, Richard Gerstl…) dont la place dans une histoire de l’art révolue est une évidence pour beaucoup. Mais ces pratiques, précisément, conservent ceci de dérangeant qu’elles étaient portées par une conception critique, non de l’art et de ses moyens propres, mais de la société dans laquelle elles s’exerçaient. Le véritable artiste expressionniste (si l’on considère que Forstner fait partie d’une telle « famille ») questionne par ses œuvres autant les autres que lui-même : son propre regard s’applique à décoder les travers d’une communauté, à rendre compte des mythes collectifs et leurs impacts sur tous, et non à explorer une intériorité nombriliste et à chercher à l’imposer avec plus ou moins de force.
Souvent de grand format et marqués par une énergie gestuelle parfois destructrice, les tableaux de Gregory Forstner dépeignent régulièrement des figures allégoriques, notamment des hommes à tête d’animaux (dans la tradition des fables pour enfants, à la manière de La Ferme des animaux de George Orwell). Ils vont à l’encontre de tout naturalisme ou réalisme et sont une manière de dénoncer une modernité aberrante. Héritier de la liberté totale du créateur illustrée au XXe siècle par Giorgio De Chirico, Forstner passe, avec autant de désinvolture que de sérieux, d’un sujet à l’autre, fait des contre-pieds déroutants, mais toujours avec l’exigence d’une cohérence assumée.